Mettre la formation dans le bon sens…

Article rédigé par  Paul Santelmann, directeur de la veille « emploi & qualifications » à l’Afpa (mars 2016)

On ne peut pas concentrer l’offre de formation professionnelle qualifiante sur les emplois les moins qualifiés, les moins rémunérés et les moins attractifs. L’appareil de formation professionnelle (initiale et continue) doit d’abord répondre au renouvellement du système productif et du tissu économique. Il doit même l’anticiper et l’infléchir dans le sens de l’intérêt des actifs les moins qualifiés et de la qualité du travail.

Dit autrement, le système de formation doit d’abord ouvrir des horizons professionnels aux moins qualifiés qui le souhaitent et non contribuer à leur enfermement dans les emplois du bas de l’échelle sociale et qui ont plutôt vocation à être exercés de façon transitoire.

La faible attractivité de nombreux emplois marqués par le temps partiel contraint, des mauvaises conditions de travail et de salaire ou la précarité des statuts, tient aussi à la crainte que l’on peut avoir de se voir condamné à vie à exercer cet emploi ou stigmatisé dans la recherche d’un meilleur emploi.

Le développement de ces emplois peu qualifiés dans un certain nombre de secteurs soulève donc la question du choix d’organisations qualifiantes et d’exigences de professionnalisation.

Or il n’y a pas de déterminisme ou de fatalisme aux mauvaises conditions de travail, au temps partiel et à la production de services « bas de gamme ». Le système de formation doit ainsi d’abord être mobilisé pour cette professionnalisation des emplois peu qualifiés plutôt qu’être érigé en pourvoyeur de main-d’œuvre à des secteurs qui déqualifient, déprofessionnalisent et précarisent les salariés.

D’autant que, contrairement aux représentations dominantes, de nombreux emplois considérés comme non qualifiés sont potentiellement porteurs de compétences qui pourraient être autant de points d’appui pour des évolutions ultérieures. Si ces emplois sont considérés comme « non qualifiés » c’est d’abord parce qu’ils sont dévalorisés socialement malgré leur utilité économique et sociale.

Il en va ainsi des métiers du BTP ou des services à la personne dont on ne peut nier qu’ils sont indispensables et qu’ils exigent des qualités et du professionnalisme dans leur mise en œuvre. Le sous-développement de l’apprentissage en France résulte pareillement de son assimilation à l’exercice d’emplois dégradés ou dévalorisés.

Il faut donc le réaffirmer haut et fort : la formation professionnelle tout au long de la vie doit être avant tout un instrument de développement des compétences, d’appui aux évolutions professionnelles en cours de vie et d’accompagnement des performances économiques et sociales du système productif.

Et pas un simple outil de placement aveugle des chômeurs ou d’accompagnement des mécanismes de mobilités descendantes ou de déclassement des salariés. Quand on détériore la qualité du système de formation on affaiblit l’économie et un des leviers de progression professionnelle des actifs qui souhaitent évoluer. Ceux-là ne sont peut-être pas les plus nombreux mais de leur réussite dépend l’engagement des autres, plus pessimistes pour leur avenir. L’usage efficace de la formation découle de son rôle vertueux en matière d’élévation des personnes et non de son assimilation au traitement social des exclusions.

Il est important de ne pas perdre cette boussole pour réhabiliter l’usage de la formation auprès des personnes…

Paul Santelmann, directeur de la veille « emploi & qualifications » à l’Afpa

 

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